Apprivoiser l’absence

Posté par imsat le 21 février 2010

MA à qui j’ai fait part de ma crainte de voir mon inspiration se tarir m’a répondu : ” je pense que tu as tout dit, enfin l’essentiel; que pourrais-tu encore raconter ?”. Je ne suis pourtant pas sûr d’avoir fait remonter à la surface tout ce que je voulais, loin s’en faut.

Sur mon père, peut-être ai-je relaté non pas le principal (appréhendable objectivement) mais ce qui m’a le plus marqué chez lui. J’aimerais quand même aller au-delà des premières images, je veux dire au-delà de celles qui émergèrent au moment où se structurait dans ma tête la reconquête du bonheur d’autrefois.

L’évocation dont il s’agit, entamée à travers mes souvenirs les plus singuliers, ne pouvait s’articuler que de manière fragmentée en dépit de l’apparente continuité de la narration et des corrélations qui la fondent. C’est précisément cette fragmentation, hier levier judicieux pour une introspection féconde et salutaire, qui me laisse aujourd’hui sur ma faim. C’est elle aussi qui suscite en moi la tentation (mais rien que la tentation) de fermer la parenthèse sur ce que je sais de mon père via ce que j’ai vécu avec lui, pour aller prospecter ce qui lui appartenait en propre.

Je me suis certes demandé ici même ce que la vraie vie aurait été pour moi s’il n’avait pas disparu prématurément, mais je crois avoir été approximatif dans mes conjectures même si, en arrière-plan, j’avais la vague idée d’en dire un peu plus ultérieurement.

Il me reste à visualiser ce que fut mon père à des époques que le destin ne lui a pas permis de me (de nous) raconter de vive voix. J’aimerais donc imaginer ce que je n’ai pu connaitre de lui.

Comment était mon père dans son enfance, son adolescence, sa jeunesse ?

Comment rêver tout cela à partir de bribes, d’appréciations éparses, parcellaires, peut-être incertaines et brouillées par le temps, que je pourrais recueillir ici et là ?

La méditation générée par  ces questions, comme celle liée aux interrogations précédentes, est censée me permettre de dépasser l’absence de mon père, d’apprivoiser sa disparition, de la déconstruire.

En attendant, lorsqu’il m’arrive de me remémorer l’état dans lequel il était ce soir-là (21 février 1961), juste avant l’appel du muezzin à la prière, quelques minutes avant la rupture du jeûne, c’est une révolte indicible qui me saisit mais que je sais totalement inutile face à l’impossible, à l’irrémédiable. Il n’y a pas de révolte rétroactive.

Lamine Bey Chikhi

 

2 Réponses à “Apprivoiser l’absence”

  1. GéLamBre dit :

    Quel que soit le moment, le départ du père est toujours prématuré : ce n’est qu’après que se révèlent les non-dits …

  2. lamine Bey Chikhi dit :

    Bonjour GéLamBre ! merci pour cette observation très juste et, je crois aussi, quasi consensuelle, même si notre perception de l’absence change ou évolue avec l’âge.
    Nous avions eu quelques échanges via dz.blog.net il y a un peu plus de 2 ans…
    Salutations.
    Lamine

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