Les quatre ombres se dissipent
Posté par imsat le 7 septembre 2010
Le présent ne me paraît pas constituer une alternative crédible au passé. En parler ne me tente pas vraiment car ce serait décrire un délabrement général, une perpétuelle descente aux enfers, une régression effarante. Il n’y a rien d’autre. Si je devais relater le quotidien, je ne ferais qu’exprimer une détestation qu’on ne comprendrait pas ou qu’on trouverait excessive. Il me serait difficile voire impossible de dire du bien de ce que le présent me donne à voir là où je me trouve sauf à travestir la vérité. De toute manière, à chaque fois que j’essaie de l’investir, il me pousse à aller chercher ailleurs, et cet ailleurs touche immanquablement au temps jadis.
Dans nombre de mes souvenirs, j’ai évoqué les personnes qui ont le plus compté pour moi; je les trouvais intéressantes d’abord au regard de leurs valeurs morales. Le présent n’offre rien de comparable. Je m’inquiète d’ailleurs (même si la préoccupation reste abstraite) à l’idée de ne plus avoir à dire le bonheur d’autrefois. Ce tarissement potentiel de la nostalgie est un risque que je prends en compte. Ne plus avoir à parler du passé parce que je crois en avoir tout dit ou presque serait problématique ( j’allais dire terrible). Je me rassure comme je peux. Parfois, il me suffit d’aligner des mots pour déclencher le souvenir : ville natale, époque, quartier, passé, soleil, neige, parents, vacances, famille, grands espaces…
Des mots, certes, mais pas seulement: des moments aussi de convivialité inoubliables comme cette après-midi de décembre 1966 que M, K, T et moi avions passée à écouter de la musique en dégustant des petits fours, avant d’aller voir les Beatles dans Help au cinéma Casino. Au balcon, nous étions le seul groupe mixte. La salle était à moitié vide. Belle journée.
23 heures : » les quatre ombres se dissipent sur la route » (*) . Les références au passé sont légion. Tout transite par le passé; les choses, les êtres, les scènes de rue, le temps qu’il fait, les humeurs, les postures, les regards naturellement et tout le reste…
Lamine Bey Chikhi
(*) Dans Nedjma, Kateb Yacine parle de deux ombres.
Bonjour Lamine,
Au fond, c’est une vraie chance de pouvoir trouver a « basic secure » dans la période de son enfance. Ce n’est pas le privilège de tous, car souvent, on aurait tendance à travestir le passé, plutôt que le présent, afin de continuer à l’idéaliser pour conserver intactes toutes ses illusions.
Tanemirth à notre cousin Chafik pour ses informations sur Azrou kolal, et à Ferid pour ses précisions linguistiques.
La porcelaine est un mélange de quartz et de « Kaolin » (mot chinois, pour désigner la roche argileuse blanche) d’où peut-être, le terme « Kolal » qui semble présenter la même racine.
Les vacances auxquelles je faisais référence étaient bien à Ouaghzen en Kabylie, chez ma grand-mère maternelle.
Je suis bien aise d’apprendre que la situation s’est améliorée. En tous cas, en France la communauté se déplace toujours pour se rendre à un concert de chanteur Kabyle se produisant à l’Olympia, à guichet fermé tant il y a de monde.
Je ne sais si au Canada, les gens font montre du même engouement.
Salutations à Ferid et Lila.
Cordialement.
N. C.
Salut Nadira,
Tes explications complètent parfaitement les éléments apportés par Chafik et Ferid. Moi, j’ignorais tout cela; je ne fais donc qu’apprendre. D’ailleurs, j’ai plein de choses à « rattraper » en la matière.
Bonne continuation,
Lamine