Posté par imsat le 22 septembre 2013
La conversation n’égale pas l’écriture. Elle n’en est qu’ un succédané imparfait, passable, un outsider limité dans sa portée et ses finalités. Pour exprimer ce que je pense du cimetière de Garidi (Kouba-Alger) où reposent Mà et ma soeur Soraya, je peux certes me contenter de le faire oralement mais je ne pourrai pas en dire grand-chose. Quand on parle, tout ou presque est balisé. On ne parle pas sans limite; le temps de parole se comprime; il est compté de diverses manières. Je ne sais plus à qui j’ai dit que si j’habitais à proximité de Garidi, j’irais me recueillir devant les tombes de Mà et Soraya le plus souvent possible, peut-être quotidiennement ou tous les deux jours, qu’il fasse froid ou qu’il fasse chaud, qu’il vente ou qu’il pleuve. Pour l’heure, je n’y vais pas fréquemment mais je théorise tout ce qui s’y rapporte. Ce n’est pas comparable, ça ne remplace pas le déplacement sur les lieux mais c’est une transition utile qui aère la réflexion. La récurrence de certaines démarches crée des repères, des points d’appui, une rupture salutaire avec la vie courante, ses nuisances et ses extravagantes et déroutantes excroissances. Et cette rupture, en dépit de sa brièveté, conduit à s’intéresser à l’infiniment petit, à des choses apparemment insignifiantes. L’épitaphe inscrite sur la tombe de Mà a perdu un peu de son éclat. Il faudra y remédier. Nous en avons déjà discuté, Anis et moi. Celle gravée dans la pierre tombale de Soraya tient bon. Les sépultures se trouvent dans la partie haute du cimetière, là où l’entretien semble se faire correctement. Est-ce important ? On peut se le demander. Personnellement, je ne fais pas l’impasse sur ces détails qui concourent, avec de nombreux éléments de la nature (les couleurs du ciel, l’odeur de la terre, le silence, la verdure…) à l’atmosphère du lieu et souvent aussi, quand on y prête attention, quand on en est conscient, à l’apaisement de l’esprit.
Lamine Bey Chikhi
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Posté par imsat le 21 septembre 2013
J’aurais aimé écrire quelques mots pour commémorer les 3 ans de la disparition de Mà (ma mère). C’était il y a quelques jours. Ne l’ai-je pas fait parce que je n’étais pas inspiré ou parce que je n’en ai pas eu le temps ? Mais n’est ce-pas la même chose ? Je veux dire : Y a t-il une vraie différence entre l’inspiration et le temps (matériel) ? Je crois que, quand on est inspiré, le temps ne compte pas, n’est pas déterminant. On trouve toujours le temps de faire lorsque la tentation de l’écriture est irrésistible. Mais il y a aussi toujours ce qui précède la formalisation écrite, et cela se passe dans la tête. Je n’ai jamais cessé de penser à Mà et cela transcende l’hommage ponctuel que me suggère le 19 septembre de chaque année, date anniversaire de son décès. Quand je dis hommage ponctuel, je songe à toutes les formes qu’il est susceptible de revêtir (recueillement, prière, pensée, conversation, poème, réflexion…). Ces formes de célébration ne me séduisent pas toutes de la même façon. Celle qui passe par le dialogue, la conversation est tributaire des parties en présence, de leur tempérament, des convergences qui les rapprochent. Mà était mon interlocutrice privilégiée. Quand il nous arrivait d’évoquer des êtres chers disparus, nous prenions le temps de le faire. Dans ce que nous en disions, tout était significatif, consistant, important, intéressant. Parfois, de simples détails qui avaient, pensions-nous, déserté notre mémoire, refaisaient surface, conférant au propos aussi bien qu’à la personne dont nous parlions une dimension particulière. Mà exprimait et développait toujours sa pensée simplement alors que, parce que cela me réjouissait et surtout me permettait de prolonger la discussion avec elle, je finissais par faire prendre à mes idées toutes sortes de bifurcations et autres extrapolations philosophiques ou littéraires. Mà me paraissait en phase avec les nuances que j’introduisais dans ma perception des choses. Mais l’était-elle réellement? En tout cas, elle n’était jamais dans les faux-semblants. Son écoute n’était pas feinte. Ses répliques et ses questions non plus. C’était mon sentiment, c’était ma conviction. « Le plaisir qu’il y a à comprendre certains raisonnements délicats dispose l’esprit en faveur de leurs conclusions » (Paul Valéry).
Lamine Bey Chikhi
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