Ce que je pense de Bouteflika -6-
Posté par imsat le 9 janvier 2014
J’étais en stage à Anvers depuis près de deux mois. Je lisais Le Monde tous les jours pour me tenir au courant de l’évolution de l’état de santé du Président Boumédiène, atteint de la maladie de Waldenström. J’étais évidemment inquiet pour lui, pour l’Algérie, pour mes proches, pour moi. J’essayais de me rassurer en me disant que s’il venait à décéder, Bouteflika son alter ego et dauphin, lui succéderait naturellement, la continuité serait assurée et la vie en Algérie continuerait à être un long fleuve tranquille. Je me rassurais ainsi mais je sentais dans le même temps qu’une disparition de Boumédiène ne pouvait pas laisser les choses en l’état. Je n’aime pas les bouleversements institutionnels, socio culturels, politiques. Le conservatisme a ses avantages. Et puis, Boumédiène faisait pleinement partie de mon quotidien. Lui non plus n’était pas un personnage ordinaire. Il était austère, sobre mais aussi charismatique alors que Bouteflika, outre l’aura dont il disposait,, était flamboyant, extraverti. Ils étaient complémentaires à tous points de vue. Etaient-ils conscients de cette synergie qui me paraissait extrêmement bien huilée ? Je crois en tout cas que c’est cette convergence de fond qui leur a permis de cohabiter et de diriger l’Algérie 13 années durant dans une entente plus que cordiale.
Une belle oraison funèbre. Début décembre 1978, retour à Alger. Décès de Boumédiène (27.12.1978). On s’y attendait bien sûr. Mais notre tristesse bien que partiellement amortie était là, réelle, profonde. J’avoue cependant que ce que j’ai conservé de cet événement, ce n’est finalement pas la disparition proprement dite de Boumédiène mais plutôt l’oraison funèbre prononcée par Bouteflika lors des obsèques du Président au cimetière d’El Alia. Pour moi, le souvenir sonore et visuel de cette oraison renvoie quasi exclusivement à Bouteflika, à son émotion perceptible mais contenue, à sa façon presque mélodieuse de lire le texte. Avait-il écrit l’oraison ou lui avait-on simplement demandé de la prononcer ? Je savais qu’il y avait à la Présidence de la République quelques conseillers compétents, cultivés et parfaitement aptes à écrire des textes percutants. Je pense en particulier à Smail Hamdani et Mohiedine Amimour. Je crois quand même que Bouteflika y a contribué substantiellement. Ce que je continue également de croire, c’est que, lue par quelqu’un d’autre que Bouteflika, l’oraison n’aurait pas produit le même impact, la même résonnance auprès des millions d’algériens qui avaient suivi l’événement en direct devant leur poste de télévision. Je le redis: Je ne suis pas en train de faire le panégyrique de Bouteflika. J’essaie juste d’expliquer mon intérêt, mon admiration pour lui autrement que par des éléments purement politiques ou politiciens. C’est pourquoi, je continue de soutenir que si l’oraison avait été lue par un autre responsable de l’Etat, elle m’aurait laissé complètement indifférent. Je n’ai pas envie de citer les noms de ceux qui (membres du Conseil de la Révolution ou du BP du FLN) pouvaient prétendre le faire à sa place. Ce que je sais, c’est que je n’éprouvais de l’empathie que pour Bouteflika. Les autres n’avaient pas sa fluidité, la qualité de sa diction, sa « capacité » à émouvoir, sa sincérité.
Lamine Bey Chikhi
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