Ce que je pense de Bouteflika -27-
Posté par imsat le 3 février 2014
« l’Algérie est un pays ben étrange. Son problème, c’est que le algériens ne s’aiment pas entre eux. Et puis, je ne comprends pas pourquoi les jeunes ne veulent travailler ni dans l’agriculture ni dans le BTP où les besoins en main d’oeuvre sont pourtant immenses. Ils veulent tous être gardiens de nuit dans l’administration ». Je le dis de but en blanc : Je ne trouve rien de discutable dans cet extrait du discours prononcé par Bouteflika le 26 juillet 2008 devant les maires du pays. L’observation du Président résume d’une certaine façon le malaise algérien dans sa configuration la plus profonde, la plus complexe. Je m’abstiens de plancher sur les causes à l’origine de cette détestation de l’algérien pour l’algérien. Je n’ai pas envie de faire l’impasse sur la valeur intrinsèque du constat. Les gens, en tout cas beaucoup d’entre eux, sont souvent expéditifs dans l’évaluation de ce que la réalité leur donne à voir. Il sont impatients de connaître la suite des choses tout en restant dans la superficialité. Moi, ce qui m’intéresse en premier lieu, ce sont les remarques liminaires, leur vérité, leur audace éventuelle, leur portée didactique. Partout dans le monde, les gens ne s’aiment pas entre eux.
Certains qualificatifs se suffisent à eux-mêmes. La lutte des classes a pris d’autres formes d’expression, d’autres dimensions. Les voisins ne s’aiment pas vraiment entre eux. Quand Bouteflika dit trouver étrange notre pays, c’est vrai. Etrange pourrait signifier incompréhensible, curieux, invraisemblable, étonnant, stupéfiant, bizarre, hors-normes. Ce qui est notable, c’est qu’il l’ait pensé et dit. Les sociologues vont directement aux causes du constat; ils en parlent de façon alambiquée. Ils croient détenir la vérité. Ils ne prennent pas le temps d’apprécier le préambule, l’exposé des faits. Ils aimeraient empêcher les autres de s’imprégner des observations de base. Ce sont des rabat-joie. Quand j’ai entendu Bouteflika évoquer l’étrangeté de l’Algérie, le rapport controversé, conflictuel de l’algérien à l’algérien, les gardiens de nuit, j’ai d’abord tout de suite adhéré au propos. Le Président avait raison. Pourquoi ? Parce que ce qu’il disait était dans la rue, dans la vraie vie. Tout le monde disait la même chose, même ceux qui voulaient devenir gardiens de nuit. Sauf que dans la bouche du Chef de l’Etat, cela a pris une autre signification, une autre résonance. Moi si je dis que l’Algérie est un pays bien étrange, ça ne prend pas, ça n’a pas d’impact. Mais quand ça vient du Président, c’est autre chose. Les historiens, les sociologues essaient de tout expliquer alors que certains qualificatifs se suffisent à eux-mêmes. Les algériens ne s’aiment pas entre eux. Soit. Les flamands et les wallons non plus. Idem pour les français, les russes, les espagnols et les catalans, les indiens. Ce n’est pas la comparaison qui est intéressante. Moi, ce que je retiens, c’est la sidération de Bouteflika face à une réalité connue de tous. C’est le mot étrange qui m’a interpellé. Prononcé par le Président, il vient relativiser en quelque sorte le pouvoir de compréhension et d’action du premier magistrat du pays. Et c’est cela que je trouve digne d’intérêt. L’étrange échappe à l’entendement, au raisonnement logique, au bon sens.
Lamine Bey Chikhi
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