Ce que je pense de Bouteflika -41-

Posté par imsat le 25 février 2014

« Je ne serai jamais un trois-quart de Président ». Cette phrase prononcée par Bouteflika dès son accession à la magistrature suprême en 1999 est encore dans les mémoires. Elle fut abondamment commentée. Les analyses suscitées par le propos cinglant du chef de l’Etat portèrent essentiellement sur le rôle de l’armée dans la vie politique du pays, sa place réelle dans l’articulation et l’exercice du pouvoir, ses rapports avec l’institution présidentielle et par ricochet et plus précisément avec le président de la République. Au risque de me répéter, je précise quand même que ce n’est pas la décortication de la phrase qui m’intéresse en premier lieu. Je me demande d’ailleurs pourquoi on va  directement et presque dans la précipitation au décryptage des déclarations politiques, de leur contenu, de leur portée alors même qu’elles présentent d’autres aspects intéressants, particuliers, révélateurs, significatifs.

Stratégie sémantique ? « Je ne serai pas un trois-quart de Président ». Bouteflika l’a dit et il l’a fait de la façon la plus claire, la plus explicite possible, et c’est d’abord cela qui est marquant et qui est censé retenir l’attention. Jamais auparavant, la fonction présidentielle n’avait été évoquée de la sorte. L’affirmation n’est pas banale. Elle démarque à nouveau nettement le Président de tous ses prédécesseurs de surcroît sur un terrain spécial, celui des modalités d’exercice du pouvoir (présidentiel). La mise au point séduit par les mots employés pour sa formalisation, par son esthétique. Il y a de la fermeté dans cette façon de dire. En l’occurrence, affirmer c’est annoncer la couleur, marquer, baliser son pré carré, établir une ligne de démarcation. Et puis, il y a une précision mathématique dans la formule. Le pouvoir du Président ne saurait être fractionné. C’est le « trois-quart » auquel se réfère Bouteflika qui m’a immédiatement séduit. Il pouvait utiliser d’autres termes pour signifier qu’il serait un Président à part entière. La proportion introduite par ses soins était destinée à frapper les esprits. Trois-quart, c’est plus que la moitié mais ce n’est pas le total, ça ne fait pas le compte. Et puis, ce « trois-quart », je trouve que c’est un formidable raccourci que l’on peut emprunter pour comprendre assez vite la vision bouteflikienne du pouvoir. On peut spéculer sans limite sur les rapports réels entre le Président et l’armée (beaucoup l’ont fait et continuent de le faire). Moi, je préfère d’abord m’appesantir sur les mots, m’interroger sur ce qui conduit à opter pour tel mot plutôt que pour tel autre, deviner les raisons à l’origine du choix arrêté en définitive. Peut-on, par exemple, parler de stratégie sémantique à propos du discours de Bouteflika en général ? C’est une question que je me suis posée à maintes reprises. J’étais enclin à y répondre affirmativement. Je continue de penser que rien, dans ses déclarations, n’est improvisé ni laissé au hasard, que tout, au contraire, est jaugé, pesé, réfléchi. Enfin, je crois que, quand on veut disserter sérieusement sur le pouvoir en Algérie, on ne peut honnêtement pas passer sous silence la phrase référentielle de Bouteflika, celle qui accentue sa singularité, le distinguant ainsi complètement de ses prédécesseurs.

Lamine Bey Chikhi

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