Ce que je pense de Bouteflika -49-

Posté par imsat le 15 mars 2014

Les comparaisons entre les hommes politiques sont fréquentes, a fortiori lorsqu’elles concernent des  personnalités de premier plan. Chez moi, c’est systématique; c’est un vieux réflexe qui remonte aux années 1970. A propos de Bouteflika, je ne me suis pas simplement demandé pourquoi et en quoi il était plus intéressant que les autres, c’est-à-dire ses éventuels concurrents. Je me suis aussi posé la question de savoir pourquoi il incarnait la chose politique nettement mieux et plus profondément que ses rivaux. Mes réflexions sur cette dimension comme sur d’autres points restent adossées à des images. En l’occurrence, deux faits me permettent d’illustrer l’idée que je voulais développer. Le premier fait est lié à la démission d’Ahmed Benbitour de son poste de chef du gouvernement en août 2000, le second est relatif à la candidature de Ali Benflis à l’élection présidentielle de 2004. Ce ne sont pas les aspects purement factuels de ces événements qui m’intéressent. Ces deux situations suscitent ma curiosité par rapport à ce qu’elles donnent à voir quant à la notion de temps politique. Les initiatives précitées m’ont paru précipitées, prématurées, presque improvisées. Pour moi, c’était évident; je me souviens l’avoir dit à Yabb, arguments à l’appui. Mais je ne me rappelle pas avoir lu des commentaires de presse allant dans le sens de ce qui me paraissait pourtant flagrant, à savoir l’inopportunité des démarches en question. Cette inopportunité, c’est la résultante d’une vision comprimée, étriquée du temps; c’est le primat du temps court. L’honnêteté, la bonne foi, le sens des valeurs n’ont rien à voir avec cette perception. On croit judicieux d’avoir opté pour tel ou tel choix jusqu’au jour où l’on se rend compte de l’erreur de timing. Le rattrapage est difficile, périlleux et, dans la plupart des cas, impossible. Après la démission de Benbitour, après la candidature de Benflis à l’élection de 2004 (candidature qui m’a fait un peu penser à celle d’Edouard Balladur à la présidentielle française de 1995), je me suis dit la même chose: « C’est trop tôt, la programmation n’est pas bonne ». Dans mon diagnostic de l’époque, le président de la République était naturellement omniprésent. Je jaugeais l’attitude des autres par rapport à ce que je pensais fondamentalement de la vision bouteflikienne du temps (le temps politique s’entend). Et cette vision, je l’ai toujours trouvée ancrée dans le long terme, en tout cas dans le contraire de la fébrilité, de l’immédiateté ou des échéances que l’homme ordinaire présente comme brûlantes.

Au dessus de la mêlée. Le rapport de Bouteflika au temps, c’est un long processus, une stratégie, un labeur de tous les jours, une maturation des idées. Là où les autres jettent l’éponge à la moindre difficulté dite majeure, lui, au contraire, persévère, continue d’aller de l’avant, garde la main avant de surprendre un peu tout le monde, y compris son entourage. Lorsque les autres croient l’affaire pliée à leur profit, lui, a déjà fait en sorte que le temps (toujours le temps) joue pour lui. L’ancien chef de gouvernement, Ahmed Ouyahia,  est le seul homme politique a avoir tenté de rester en phase avec le traitement bouteflikien du temps. J’ai même écrit sur ce blog il y a quelques années que Ouyahia avait les plus grandes chances de rentabiliser politiquement son décryptage du temps long et d’en bénéficier le moment venu. Cela dit, je ne crois pas qu’on puisse vraiment comprendre l’influence déterminante du facteur temps sur la personnalité de Bouteflika si l’on ne prend pas en compte  la jonction entre les différents étapes de son itinéraire, y compris celle liée à sa longue traversée du désert, et son retour au pouvoir en 1999. C’est tout cela qui a façonné sa vision du temps et contribué à le positionner au dessus de la mêlée, le faisant ainsi souvent apparaître comme le maître du jeu.

Lamine Bey Chikhi

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