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A brûle-pourpoint

Posté par imsat le 17 décembre 2016

Je voulais parler du temps qu’il fait et peut-être aussi de sa confrontation avec le passé, plus précisément avec la façon dont on l’appréhendait autrefois. Mais je me suis dit que si je m’amusais à l’évoquer sous cet angle, cela signifierait que je continue à regarder dans le rétroviseur. Je serais ainsi dans l’incapacité d’impulser une nouvelle dynamique à ma réflexion. Pourtant, il ne me paraît pas inintéressant de sonder ce qui pourrait relier le temps qu’il fait au temps qui passe. Aujourd’hui, tout va vite, très vite. On veut connaître le temps qu’il fait et celui qu’il va faire dans 10 ou 15 jours. On justifie cette curiosité, cette attente par des considérations pratiques, pragmatiques, pour s’organiser en conséquence. On veut tout planifier, programmer, maîtriser son timing. Il n’y a plus de surprise, de suspense. On n’est plus vraiment dans le présent (le réel ?), on est dans l’anticipation, la projection, la prévision, du moins le croit-on. On pense éviter, contourner les impondérables. On est conditionné, on se conditionne par le temps qu’il fait mais surtout par celui qu’il va faire le lendemain et les autres jours. On annonce le beau temps, des éclaircies, des nuages, des pluies orageuses, le mauvais temps. On n’échappe pas à la « dictature » de la météo. Etait-ce mieux avant ? En tout cas, je ne peux m’empêcher de songer à la perception que l’on avait du temps, autrefois. Quand je dis autrefois, je n’ai pas besoin de baliser la période considérée. C’était il y a longtemps. A l’époque, nous en parlions simplement, nous le découvrions au jour le jour. Quand il faisait beau, Mà me disait : « soleil ! » « le ciel est bleu ! ». Quand ce n’était pas le cas, elle le disait aussi mais comme pour n’importe quelle autre chose de la vie; nous étions dans le temps présent pas dans celui de la prévision, du lendemain. Le temps ne passait pas inaperçu, mais nous l’abordions dans la fluidité, nous nous en réjouissions pleinement, nous le commentions brièvement. Je crois que j’accordais plus d’importance à ce que Mà en disait qu’au temps lui-même, parce qu’elle savait en parler, parce qu’elle présentait les choses avec optimisme y compris quand il faisait froid ou quand il pleuvait abondamment. En ce sens, j’avais l’impression que le temps se figeait, et cela passait par les propos généralement détendus qu’il pouvait suggérer et qui en prolongeaient les retombées. Le temps, c’est aussi l’espace. les gens, ceux qui s’y déploient et ceux qui n’y sont plus, les disparus. « L’immobilité des êtres, la solitude d’un lieu, son silence profond, suspendent le temps: il n’y en a plus. Rien ne le mesure. L’homme devient comme éternel » (Diderot). Aujourd’hui, on est loin de ces interactions qui permettent d’apprécier le temps dans sa plénitude, d’en tirer le meilleur. Les prévisions météo l’emportent sur tout le reste, dénaturent le présent…

Lamine Bey Chikhi

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