Nedjma-5-

Posté par imsat le 23 juillet 2017

Sans la contribution financière et logistique conséquente de l’Etat algérien, Z (1969) n’aurait sans doute jamais pu voir le jour. Costa Gavras reconnaissant, l’a dit et répété à maintes reprises. Z est un film éminemment politique. l’Algérie de Boumediene qui s’était engagée dans la concrétisation de ce projet boudé par de nombreux pays, en a tiré des dividendes en termes de prestige, au double niveau interne et international. On ne comprendrait donc pas que le même effort ne soit pas consenti pour Nedjma. Un tournage en Algérie ferait la fierté des algériens. Le rapport à l’identité est évident car l’identité c’est aussi des images sur le pays, son histoire, et Nedjma en regorge. Même les algériens qui n’ont pas lu le livre s’y reconnaîtraient aisément. Et les images, les souvenirs dont il s’agit portent notamment sur des villes, celles déjà évoquées et d’autres; mais aussi sur des scènes de rue, des dialogues, des postures. Les algériens avaient été impressionnés par Omar Gatlato de Merzak Allouache (1977). Ils se sont complètement identifiés au personnage principal de ce film qui a été un immense succès populaire. Le processus d’identification a aussi fonctionné à fond par rapport à La bataille d’Alger. Le fait qu’il ait été tourné à Alger explique en partie l’engouement suscité. Le même sentiment avait prévalu au sujet de L’étranger (1967). Quelques jours avant le tournage, la télévision algérienne avait diffusé des images montrant les principaux interprètes du film, Anna Karina et Marcello Mastroianni, flâner à Alger aux abords de la Grande poste et de l’hôtel Albert 1er. Ils étaient souriants, détendus, heureux et comme déjà en représentation. La même ambiance avait régné des jours durant autour de Z; j’ai assisté au tournage de deux scènes, place Audin, j’ai même pu échanger quelques propos avec Yves Montand. l’Algérie était sereine, ambitieuse et politiquement stable. « C’était l’époque de l’effervescence cosmopolite, celle qui a régné dans les grandes villes algériennes entre 1963 et 1980 avec l’afflux des coopérants techniques et autres artisans culturels et politiques. La rue algérienne était multiethnique, multiculturelle, polyglotte ; elle offrait au quotidien un spectacle étonnamment bigarré et inspirait aux universités énergie et audace. Une aptitude exceptionnelle à accueillir la diversité des pensées et des savoirs s’est manifestée dans l’espace universitaire, entièrement décloisonné… Côté littérature, on y développait des enseignements novateurs de littérature universelle et la littérature comparée y trouvait un terrain favorable... » (Beida Chikhi, Le 5 juillet 1962. L’idée d’indépendance nationale dans la littérature algérienne). C’est ce même contexte qui a boosté la production cinématographique nationale et favorisé l’appui multiforme de l’Algérie à des coproductions de haute facture. Nedjma à l’écran, ce serait le bonheur puissance 10. C’est ma prédiction mûrement réfléchie pour peu que le traitement du film soit à la hauteur des enjeux. La prise en charge du projet doit répondre à des exigences intellectuelles comparables à celles auxquelles satisfont les universitaires quand ils planchent sur des textes d’auteur. La complexité de Nedjma doit imposer à ceux qui accepteront de produire et de mettre en scène le film un effort de réflexion et de compréhension spécifique. On ne doit pas occulter ce préalable. Ceux qui ne sont pas en position de répondre à ce critère doivent passer leur chemin. Je le dis comme je le pense car ces dernières années, les films retraçant le combat de certains héros de la guerre de libération nationale me paraissent avoir été bâclés. Ils sont d’ailleurs passés inaperçus dans le champ médiatique. Ces films n’ont pas marqué les esprits, loin s’en faut. Ceux qui les ont commandés comme ceux qui les ont réalisés ont une vision étriquée, parcellaire de l’histoire. On en prépare d’autres, semble t-il avec la même précipitation, par souci de populisme. Voilà pourquoi Nedjma ne peut pas, ne doit pas être traité n’importe comment ni par n’importe qui !

Lamine Bey Chikhi

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