I comme Italia -48-
Posté par imsat le 22 décembre 2024
« Ce qui reste dans la vie, ce ne sont pas les cadeaux matériels, mais les souvenirs des moments que vous avez vécus et qui vous ont rendu heureux. Votre richesse n’est pas enfermée dans un coffre-fort,, mais dans votre esprit ; ce sont les émotions que vous avez ressenties à l’intérieur de votre âme. » (Alda Merini)
Mon écriture serait quelque peu labyrinthique. On me l’a dit. Je suis d’accord avec cette observation. Mais je me rappelle parfaitement avoir bien souligné dès le départ que mon propos ne serait pas linéaire. Que ce ne serait pas non plus une histoire avec un début, un déroulé chronologique de faits et un épilogue plus ou moins escompté, plus ou moins logique. Non, c’est une réflexion presque au jour le jour qui ne s’inscrit dans aucun plan préalable. Il y a des moments magnifiques de bonheur, mais il y a aussi des incertitudes, des rebondissements dans les impressions, des doutes, et c’est cela que j’essaie de faire ressortir. Nous n’avons pas conversé depuis près de dix jours (pour moi, une éternité), j’étais tenté de lui écrire, je ne l’ai pas fait, je crois que sa charge de travail la mobilise complètement, il y a peut-être autre chose, une lassitude, une fatigue, je ne sais pas, voilà, c’est le réel. En même temps, tout est fragile, je veux dire notre relation n’est pas sanctuarisée, elle n’est à l’abri de rien. C’est ce que je pense mais je ne connais pas son point de vue. Je crois que c’est une personne sereine. Je me suis demandé si je pouvais autonomiser mon récit et le poursuivre indépendamment de ce qui pourrait affecter notre dialogue de quelque facon que ce soit et pour quelque raison que ce soit. Oui, ce serait possible, je me positionnerais alors par rapport à ce qui fut, je réintègrerais le monde des réminiscences. Mon égérie ferait partie de mes récents souvenirs. Certes, une telle métamorphose est envisageable mais je ne saurais dire si elle serait facile à « gérer ». Théoriquement, tout semble possible et faisable, mais ce n’est pas qu’une affaire de mots, d’arrangements sémantiques, loin s’en faut. Cela n’aurait rien avoir avec mes flash-back de l’enfance ou de l’adolescence. La comparaison a ses limites. Cet après-midi, je me suis remémoré certaines séquences de l’époque en question. Je me suis mis à concevoir une sorte de recueil autour des habitudes qui étaient les nôtres après le lycée. Quand je dis les nôtres, je pense à celles de D.Messaoud, D.Lahcène et les miennes. Tout m’a paru très facile, la formalisation du recueil était déjà dans ma tête. Il me suffirait d’évoquer notre passe-temps, nos loisirs et dire simplement ce que nous faisions effectivement quand nous sortions du lycée à 16h30. En fonction des jours et de notre humeur, nous avions l’embarras du choix: le baby-foot, un délicieux bol de pois-chiches chez Aami Hmida pour 50 centimes, une partie de foot, un excellent thé à la menthe au café des allées, un bon sandwich aux merguez chez le rouget dont la baraque se trouvait à proximité de l’école Jules Ferry, la chorale de la troupe Essaada dont nous faisions partie, le cinéma Le Régent pour la dernière séance…Pour le cinéma, c’était surtout avec S.Azzeddine, mon voisin de quartier. Un de mes souvenirs inoubliables : Nous venions de voir Le Samouraï de Jean-Pierre Melville, et en regagnant notre quartier, nous nous sommes amusés à imiter certains gestes d’Alain Delon, ses silences, à marcher, à ajuster nos manteaux comme lui, tout ça dans une franche rigolade…Le cinéma, c’était au moins deux fois par semaine. Je pourrais évoquer plein d’anecdotes de ce genre. En tout cas, il y avait toujours quelque chose à faire et tout coulait de source…oui, je pourrais raconter cela dans le détail et spontanément. Pour « I comme Italia » c’est complètement différent et, ajouterais-je, incomparable. C’est un autre registre, une autre catégorie et une grille de lecture spéciale. Certes, il y a une dimension nostalgique particulière dans ce qu’elle représente pour moi mais je ne saurais la raconter sans tenir compte de sa complexité. La complexité, en l’occurrence, c’est une exigence intellectuelle et artistique. Mon inspiratrice est de toutes les époques, elle est intemporelle. C’est sa singularité. Ce que je crois, c’est que le récit ou plutôt ses prolongements s’inscriraient nécessairement dans cette perspective. La nostalgie serait ressentie, vécue a posteriori mais je ne saurais dire comment. Ces considérations reflètent mon état d’esprit en lien avec la récente absence de « I comme Italia ». Je les publie telles quelles. Mais j’écrirai un autre chapitre pour raconter son éblouissante réapparition et notre superbe conversation d’hier, samedi 21 décembre, autour de la prodigieuse relation épistolaire entre Boris Pasternak et Marina Tsvetaeva.
Lamine Bey Chikhi
Post-Scriptum : Elle connaît mon talon d’Achille. Elle est adorable. Je le lui ai dit.
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